En 1992, Georges H. Bush est en campagne pour sa réélection à la présidence des Etats Unis. En politique étrangère, tout semble lui sourire: Éclatement de l'URSS en Août 1991, campagne victorieuse contre Saddam Hussein en Irak cette même année, approuvée et soutenue par une large coalition internationale. L'action du président américain pour libérer le Koweït est largement saluée, et le président est très populaire dans son pays. Pourtant, quelques mois plus tard, Georges H. Bush est battu.
En 2004, Georges W. Bush, le fils donc, est lui aussi en campagne pour sa réélection. Sa politique étrangère est jugée calamiteuse. Les troupes américaines sont embourbées en Irak et l’Afghanistan est hors de contrôle. A cela s'ajoute de fortes critiques sur sa vision simpliste du monde, notamment son concept d' "Axe du Mal". En Irak, on ne trouve pas les armes de destruction massive dénoncées. Les boys meurent alors que l'administration américaine a sciemment menti au monde entier sur ses intentions. On peut imaginer un destin à la Lyndon Johnson, totalement déconsidéré par la guerre du Vietnam, et qui ne voudra même pas se représenter. Et Georges W. Bush est réélu. Il est même mieux réélu qu'élu. Que s'est-il passé ?
Retour en 1992. Pendant la campagne électorale, Bill Clinton, jeune gouverneur de l'Arkansas représente le parti démocrate face au sortant républicain, jugé imbattable après ses succès sur la scène internationale. Peu expérimenté, Clinton va pourtant gagner face à un Georges H. Bush trop sûr de sa victoire et affaibli par la candidature indépendante de Ross Perot, en rupture sur sa politique fiscale. Mais ce qui va surtout faire basculer la campagne, c'est la situation économique du pays. La conjoncture est mauvaise, le chômage remonte à un niveau record de 7,8% et les plans de lutte contre la récession du président sont combattus par un congrès à majorité démocrate. James Carville, conseiller de Bill Clinton va matérialiser cette situation par une phrase: "It's the economy, stupid". Le candidat va alors marteler ce message aux quatre coins du pays. Et les courbes vont s'inverser. Georges H. Bush, vainqueur de l'Union Soviétique et de Saddam Hussein, populaire et favori des sondages, est battu par un jeune démocrate sans grande expérience. En 2004, Georges W. Bush est honni par le monde entier. Même aux Etats Unis, sa cote de popularité est médiocre. Mais l'économie est en plein redémarrage, après la crise des nouvelles technologies des années 2000. La croissance est au rendez vous et le chômage baisse à 5,5%. Bush Junior sera réélu pour un second mandat face au démocrate John Kerry.
Au regard de ces faits, l'annonce des mauvais chiffres du chômage en octobre (+1,2%), confirmant une tendance de fond depuis le début de l'année, est une catastrophe pour le candidat Sarkozy. La campagne commence en réalité à se jouer maintenant avec ces chiffres alarmant. En effet, la situation devrait vraisemblablement encore de se dégrader en 2012, et le chômage pourrait alors atteindre les 10% au moment de la campagne présidentielle. Mettant le président sortant dans une situation désespérée dans l'optique de sa réélection, celui-ci cumulant la (très) mauvaise situation économique qu'à connu Bush père, et la faible cote de popularité de Bush fils. Beaucoup pour un seul homme.
Les socialistes ont toutes les chances de gagner. Même si ce sera probablement par défaut. L'exemple récent des élections espagnoles l'atteste. Candidat peu charismatique, avec comme seul programme la poursuite de la rigueur déjà initiée par ses adversaires sortants, Mariano Rajoy a malgré tout largement gagné. De quoi donner de l'espoir à François Hollande qui malgré les cafouillages de son début de campagne a de bonnes chances de l'emporter. A moins de se saborder tout seul sur un programme trop irréaliste. Nous verrons dans quelques semaines les arbitrages qu'il aura choisi.
Dans notre histoire récente, la défaite cinglante de Lionel Jospin en 2002 l'atteste. Le chômage a globalement baissé pendant son mandat, mais la conjoncture a connu un net ralentissement économique en 2001-2002. Cette brusque remontée du chômage avant les élections présidentielles a eu raison de ses ambitions, minées de plus par les divisions à gauche.
L'économie prime donc sur le vote des électeurs quoi qu'il arrive, consciemment ou inconsciemment. Les succès Libyen de Sarkozy, où l'élimination de Ben Laden par Barack Obama ne leur seront d'aucune aide pour une éventuelle réélection (pour la postérité si peut être). Ce qui compte, c'est si le fils, la petite fille, le frère ou la femme a un emploi. Si ce n'est pas le cas, le pouvoir en place perd. C'est la règle.
It's the economy, stupid.
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