Martine Aubry nous l'avait bien martelé il y a quelques mois pendant la campagne des primaires socialistes. Le projet socialiste, et notamment ses 20 propositions phares, c'était le socle commun de tous les candidats socialistes de la primaire. Projet qui a été le fruit du travail des cadres du parti et ensuite validé par les militants. Ainsi, que ce soit François Hollande, Arnaud Montebourg, Ségolène Royal, Manuel Valls ou bien elle-même, tous s'engageaient, en cas de victoire, à piocher largement voire intégralement dans le projet du parti pour bâtir leur futur programme. Seul Jean-Michel Baylet, qui n'est pas socialiste mais président du Parti Radical de Gauche (PRG), déclarait s'en affranchir car jugé irréaliste. Sympa pour les copains.
Les primaires sont à peine achevées que le grand vainqueur, François Hollande est déjà sous le feu des critiques de ses adversaires de droite à propos de son futur programme. En effet, à charge désormais pour François Hollande d'assumer et d'incarner les 300 000 emplois d'avenirs, sorte de nouveaux emplois jeunes de jadis Martine Aubry, ou encore un retour programmé de la retraite à 60 ans, peu opportun en période de disette dans les finances publiques. Le projet socialiste devient très vite un boulet pour le candidat Hollande qui s'empresse peu à peu de s'en défaire par la voix de ses principaux lieutenants, Michel Sapin ou Pierre Moscovici. Ainsi nous expliquent-t-ils que le futur programme sera très différent du projet, qu'entre temps il y a la crise économique, et que donc il faut revoir sa copie. Ce sont les militants et les électeurs des primaires qui peuvent être content. Le socle programmatique de la primaire est déjà caduque.
Le projet socialiste ? Le candidat Hollande n'est pas concerné.
Quelques jours plus tard, le parti socialiste négocie avec ses partenaires d'Europe Ecologie Les Verts (EELV) un accord en vue des élections législatives de 2012 qui vont suivre la présidentielle. Avec surtout à l'esprit les tractations sur le partage des circonscriptions. François Hollande, candidat qui doit prendre de la hauteur, se désintéresse de cet accord pour se concentrer sur sa campagne. Et, c'est à tort qu'il laisse Martine Aubry et ses amis négocier avec les écolos. Bilan, la plupart des proches du député de Corrèze sont évincés au profit de ceux de la première secrétaire. Mais pire, celle-ci négocie la fermeture de centrales nucléaires et l'arrêt de la filière MOX. Vif inquiétude dans le monde l'industrie, notamment EDF et AREVA. François Hollande est de nouveau dans l'embarras et se fait rappeler à l'ordre par ces groupes industriels.
En contradiction avec son parti, il déclare simplement ne part se sentir engagé par l'accord Verts-PS. Eva Joly, la candidate écologiste, non plus d'ailleurs.
L'accord législatif Verts-PS ? Le candidat Hollande n'est pas concerné.
Il y a 10 jours, éclate l'affaire de la fédération PS du Pas de Calais. Le chevalier blanc du parti, Arnaud Montebourg, après avoir batailler dans le sud contre le baron PS des bouches du Rhône, Jean Noël Guérini, part cette fois ci donner l'assaut dans le nord. Visé, le député-maire de Liévin et proche de François Hollande, Jean-Pierre Kucheida. Les faits reprochés : enquête en cours sur un système de financement occulte du parti socialiste du Pas de Calais et des emplois fictifs. A cela s'ajoute le rapport très critique de la chambre régionale des comptes sur la gestion de l'Epinorpa, organisme de gestion de logements. Enfin des soupçons de corruption et de versement de rétro-commissions planent sur l'élu PS suite aux accusations de Gérard Dalongeville, ex-maire PS d'Hénin Beaumont, et lui même incarcéré pour des détournements de fonds publics.
Le candidat socialiste laisse la première secrétaire s'occuper de l'affaire. C'est une histoire interne explique-t-on du côté des proches de François Hollande. Et, bien qu'ayant été premier secrétaire du parti pendant 11 ans, il ne se sent pas concerné par cette affaire. Otez moi d'un doute, François Hollande n'est-il pas le candidat représentant ce même parti ? N'a t-il donc aucun intérêt pour ce qui s'y passe, notamment dans les fédérations ?
Le fonctionnement des fédérations du parti socialiste ? Le candidat Hollande n'est pas concerné.
Enfin, lundi dernier, le candidat socialiste est interrogé par Jean-Michel Apathie sur RTL à propos de l'accord Européen signé la semaine dernière à Bruxelles par 26 pays. Celui-ci déclare qu'il ne peut accepter cet accord en l'état, notamment parce que selon lui la discipline budgétaire n'est pas la bonne réponse. Il soutient donc qu'une fois élu président, il le renégociera pour y ajouter ce qui manque, notamment le soutien à la croissance.
Il va sans dire que même s'il a parfaitement le droit de le faire, on peut fortement douter de la capacité de François Hollande à aller tout seul renégocier cet accord dans 6 mois face à tous les pays européens, l'Allemagne en tête. Mais le candidat commet sans doute là une faute majeure. L'Europe est un héritage commun de la gauche et de la droite, et en ces périodes de crises et d'incertitudes, l'unité doit primer. Une telle parole venant d'un possible futur président ne peut que jeter un peu plus le trouble sur l'économie et les marchés financiers alors qu'il y a urgence à sauver la zone euro.
L'accord européen ? Le candidat Hollande n'est pas concerné.
Mais ne lui dite pas qu'il y a une élection présidentielle l'année prochaine, il pourrait se sentir concerné.
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