Le verdict est tombé hier soir. A 20h pour beaucoup, un peu avant pour les aficionados des "réseaux sociaux" comme on dit. A peine les estimations annoncées, les instituts de sondages en prenaient, comme souvent, pour leur grade. Coupable de s'être une fois de plus trompé. Ils auraient sous-estimé la participation, plus forte que prévue, sous-estimé le vote Marine Le Pen, et au contraire surestimé le vote Jean-Luc Mélenchon. Certes. Mais avouons objectivement que tous les instituts avaient au moins trouvé l'ordre d'arrivée de tous les candidats, et à peu près l'ordre de grandeur de leur score. Donc arrêtons la mauvaise foi. Les sondages se sont, par le passé, bien davantage trompés.
Examinons maintenant les résultats. Le candidat socialiste, François Hollande, est en tête. C'est donc plutôt un succès pour lui. Néanmoins, par rapport aux études de ces dernières semaines, son résultat est légèrement en deçà de ce qui était attendu. De plus, si la gauche progresse par rapport à 2007, elle reste encore minoritaire en France. Nous y reviendrons. Le président sortant talonne quant à lui le socialiste. 1,5 point seulement les sépare. C'est néanmoins un désaveu certain pour Nicolas Sarkozy, premier président sortant à ne pas arriver en tête au premier tour lors de sa campagne de réélection, et qui est en repli de 4 points par rapport à 2007. Le bloc de droite modérée, au contraire de celui de gauche, baisse. Deuxième tour très délicat en perspective pour le candidat Sarkozy. Mais l'évènement de la soirée reste le score très important de Marine Le Pen. Si elle ne parvient pas à atteindre le deuxième tour, ses 18% la positionne en situation de force. Ses voix sont incontournables pour faire l'élection.
Au rayon des déceptions, il y a tout d'abord Jean-Luc Mélenchon. Avec 11% des voix, le Front de Gauche échoue à devancer Marine Le Pen, et est clairement en position de faiblesse dans la perspective d'une négociation avec le PS pour les élections législatives. Il faut croire que les médias et les sondeurs s'étaient plus emballés que les électeurs pour le "Robespierre de plein air" comme le surnomment certains. Autre déception, le score de François Bayrou. Le leader centriste pointe à seulement 9% des voix, contre 18% en 2007. C'est la chute la plus spectaculaire, probablement victime d'un positionnement trop raisonnable dans une élection qui ne l'est pas forcément. Il reste néanmoins un élément incontournable pour faire basculer l'élection, mais il ne pèsera pas dans les négociations éventuelles comme il aurait pu le faire en 2007 s'il avait suivi cette stratégie. Adieu un éventuel poste de premier ministre.
Pour les autres candidats, leurs scores ne pèsent presque rien dans le jeu politique de second tour, tant l'élection s'est polarisée sur les 5 premiers candidats. C'est donc sans trop de regrets que nous disons adieu aux gaffes d'Eva Joly, aux facéties de Philippe Poutou, à Monsieur tout-est-de-la-faute-de-l'euro Dupont-Aignan, à l’orthodoxie communiste de Nathalie Arthaud, ou aux rêves martiens de Jacques Cheminade. On a l'étrange impression qu'une nouvelle campagne électorale commence. Il était temps !
Qu'en est-il pour le second tour ? Pour cela examinons un peu le rapport de force politique. En analysant les chiffres de ce premier tour, et en les comparant à 2007, on abouti à quelques conclusions. Tout d'abord, on observe une hausse de l'extrême gauche, des écologistes et du parti socialiste. Si le bloc de gauche totalisait en 2007 environ 36%, il passe désormais à 44%. Plusieurs remarques à ce propos. Ce score est très élevé pour la gauche, et peut annoncer une victoire au deuxième tour. Néanmoins, lors de l'alternance de 1981, son score était de 46%, sans compter, à l'époque, les 4% des écologistes. La gauche pesait aussi 46% en 1974, quand François Mitterrand échoua pourtant contre Valéry Giscard d'Estaing. Comparons maintenant ce score au bloc de droite. Celui-ci est plus difficile à définir. Doit-on compter le Front National ou le Modem ? Si on fait le total de la droite modérée (Sarkozy, Dupont-Aignan) et du score de Marine Le Pen, on obtient environ 47% contre 44% pour la gauche. Paradoxalement le total droite augmente, puisqu'il est passé de 45% à 47% entre 2007 et 2012. Les 9% de Bayrou restant juge arbitre. La France n'est donc pas majoritairement à gauche.
Est-ce à dire que Nicolas Sarkozy conserve des chances de victoire au second tour ? Oui, mais peu. En effet, l'électorat de Nicolas Sarkozy et celui de Marine Le Pen ne sont pas si semblables. L'un est plutôt libéral, classes moyennes et supérieures et pro-européen, quand l'autre est plutôt anti-libéral, classe populaire et anti-européen. Les reports de voix ne sont donc pas aussi systématiques qu'à gauche, ou le seul anti-sarkozysme suffit à fédérer les électorats socialistes et Front de Gauche, pourtant eux aussi assez différents. Sans compter Marine Le Pen qui savonne clairement la planche du président sortant pour préparer une OPA sur la droite après l'élection. Dans ces conditions, comment Nicolas Sarkozy peut-il gagner ? Un rapide calcul permet d'évaluer les reports de voix nécessaires. Il faudrait ainsi qu'au moins 50% des électeurs de Bayrou penche pour Sarkozy, ainsi que les deux tiers de ceux de Marine Le Pen. C'était d'ailleurs à peu près les reports observés sur le candidat Sarkozy en 2007. La tâche n'est donc pas impossible, mais cela semble néanmoins extrêmement difficile. Les premières études de reports de voix ne sont, pour l'instant, pas du tout suffisantes, et deux semaines ne permet guère de faire bouger sensiblement les lignes. Qu'en est il pour François Hollande ? La situation est plus confortable, car les reports de voix de l'extrême gauche sont bons. Néanmoins, pour faire son élection, il devra rallier une part de l'électorat de Bayrou, mais aussi, une fraction de celui de Marine Le Pen ! Aussi surprenant que cela puisse paraître, si l'on accuse Sarkozy de vouloir se faire réélire avec les voix du Front National, c'est François Hollande qui sera probablement élu, avec une fraction des voix de la candidate d'extrême droite.
Reste que l'étude de la carte électorale apporte des informations intéressantes. Les territoires de droite et de gauche sont extrêmement marqués. François Hollande est en tête en Bretagne, dans tout le Sud-ouest, le Nord et la Picardie, ainsi que le Massif Central. Nicolas Sarkozy a perdu certains bastions, mais reste en tête en Normandie, dans la Champagne-Ardenne, l'Alsace, la Lorraine, la Savoie et le Sud-est. Des études qualitatives, réalisées à la sortie des urnes, donnent également un éclairage intéressant sur le vote des Français. Avec quelques paradoxes. Ainsi, si Jean-Luc Mélenchon s'adresse à l'électorat ouvrier, c'est surtout les urbains bobos qui lui ont apporté leurs suffrages. Le vote ouvrier, c'est une fille de famille bourgeoise qu'il l'a obtenu, Marine Le Pen. Nicolas Sarkozy a basé sa campagne électoral principalement sur la valeur travail. Mais c'est finalement chez les retraités et plus de 65 ans qu'il a eu le plus de succès. Les cadres supérieurs ont préféré François Hollande, alors qu'ils sont particulièrement visés par les hausses d'impôts au programme du candidat socialiste. Le phénomène "bobo" dans les centres villes a largement profité à la gauche. Elle est en tête dans de nombreuses villes (dont Paris), alors que les résultats sont plus favorables à Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen dans les campagnes. Plus classique, le vote des catholiques pratiquants est allé à droite, chez Nicolas Sarkozy. Les hommes ont voté majoritairement Hollande, et les femmes majoritairement Sarkozy. Enfin, s'agissant des primo-votants, les 18-24 ans, il semble que Marine Le Pen et Nicolas Sarkozy devance François Hollande d'une courte tête sur cet électorat. Mais le candidat socialiste semble majoritaire sur l'ensemble de l'électorat de moins de 35 ans.
Il reste maintenant quelques jours avant le verdict final. Le président sortant, toujours donné battu dans les sondages, pense encore tout changer avec le débat d'entre deux tours. Il a sans doute tort. Celui-ci n'a, par le passé, jamais inversé la tendance. Mais quand on est donné battu, on se raccroche à tout. Espérons, en tout cas, que le débat s'élève un peu dans les jours qui viennent, et que le vote ne soit pas seulement un référendum anti-sarkozy. Mais bon j'ai comme un doute...
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