Avec le franc parler qu'on lui connait, le député européen EELV Daniel Cohn Bendit a lâché le sentiment de beaucoup à l'égard de la campagne présidentielle en cours : "On s'emmerde" et "Cette campagne, c'est n'importe quoi". C'est dit ! Qu'on "s'emmerde" passe encore. Après tout, si les débats étaient d'un haut niveau, et peu accessibles, il peut au final en ressortir de bonnes choses. Mais ce n'est pas le cas. Car cette campagne, c'est effectivement "n'importe quoi".
Et ce ne sont pas les sujets qui manquent. Commençons par le favori des sondages, François Hollande. Parti très tôt en campagne, avec un programme de 60 propositions, le candidat socialiste laisse dubitatif. Il reste empêtré dans un accord avec EELV sur la fermeture des centrales nucléaires. L'accord prévoit la fermeture de 24 centrales. Le candidat affirme qu'une seule sera fermée, Fessenheim. Quid des 23 autres ? Des travaux d'abord puis un démantèlement progressif. Quand alors ? Lors d'un second mandat ? Mystère. Et pourquoi Fessenheim ? Parce qu'elle est en zone sismique. Pourtant, on ne peut pas dire que ceci est posé problème jusqu'à présent. L'Alsace n'est pas non plus la zone sismique la plus à risque du monde. Concernant son programme économique, on ne peut que s'étonner de sa légèreté. Sur le rétablissement des comptes publiques, presque aucune économie de fonctionnement de l'Etat, et même des dépenses supplémentaires. Et pour les recettes alors ? Il fera payer les riches et les grosses entreprises. Pas les classes moyennes ? Non promis juré. Qui peut croire de telles mensonges ? Le compte n'y est pas monsieur Hollande, et vous le savez très bien.
Son principal challenger, Nicolas Sarkozy ne fait pas forcément mieux. Sa grande trouvaille de la campagne, ce sont les référendums. On va en faire pour tout. Pour les droits des chômeurs, pour l'immigration et que sais je encore... Comme si les français avaient déjà répondu à la question réellement posée lors des précédents référendums. Et comme si les sujets du chômage et de l'immigration étaient de nature à être traités par référendum. Et surtout, comme si Nicolas Sarkozy allait réellement mettre en oeuvre ces référendums. Côté programme, contrairement à François Hollande qui a mis toutes les propositions sur la table dès le départ, le président sortant le fait au compte goutte. Soit pourquoi pas. Mais là où le candidat socialiste a (mal) chiffré son projet, le candidat de droite s'en est affranchi. Il semble vouloir se rattraper aujourd'hui lors de la grande présentation de son programme. Soit, mais à deux semaines du premier tour, ça fait vraiment léger.
Et puis il y a le candidat qui monte, Jean-Luc Mélenchon. Le leader du Front de Gauche est porté par une dynamique certaine. Son talent de tribun fait effet et les meetings sont pleins. Mais pour faire quoi ? Pour entendre quoi ? Pour jouer un dimanche de mars un piètre remake de la prise de la Bastille? Deux siècles après sa démolition. Quelle est la prochaine étape pour ce nouveau Saint Just ? Couper la tête d'un roi ? Car économiquement, il y a peu à commenter, si ce n'est la création de 14 tranches pour l'impôt sur le revenu, pour être certain de bien tout prendre jusqu'au dernier centime. Quant à la crise de la dette, c'est la faute des méchants banquiers et des méchants riches. Conséquence, au-dessus de 360 000 euros de revenus par an, on prend tout. Punition. Qui peut croire que si cette mesure était adoptée elle réglerait le problème ? En attendant on promet des lendemains qui chantent, des SMIC à 1700 euros et compagnie...
Autres candidats plutôt bien placés, Marine Le Pen et François Bayrou. Le candidat du Modem semble tenir un discours raisonnable et mesuré sur les grands enjeux du pays, à savoir notamment sur la situation de la dette et de l'emploi. Cependant, au delà du discours, on se rend compte très vite qu'il n'y a pas de stratégie économique ni de propositions concrètes pour rééquilibrer les comptes du pays. Et lors d'une interview télévisée récente, il a contesté défendre une mesure sur l'extension d'attribution des bourses d'étude. Mesure qui figurait pourtant noir sur blanc dans son programme sur son site web. Quand les candidats ne connaissent même pas leur programme...
Pour la candidate du Front National, le problème est un peu différent. Elle connait son programme, mais semble avoir ignorée les rouages basiques de l'économie pour le construire. Lors de l'émission Des paroles et des actes, le journaliste économique François Lenglet l'interroge sur la sortie de l'euro, mesure phare de son programme. Celle-ci se lance alors dans une fumeuse démonstration sur les gains, en terme de compétitivité, d'un retour au franc. Mais quand le journaliste l'interroge sur le risque d'une dévaluation pour l'épargne des ménages, elle rassure : un franc = un euro. Sauf que dans ces cas là, il n'y a plus de dévaluation donc aucun gain de compétitivité. Et la candidate Front National semble, au passage, s'affranchir du régime flottant des monnaies. Un franc = un euro, ça ne durerait pas bien longtemps. Embourbée, Marine Le Pen préfère s'en prendre à Lenglet, forcément un europhile et libéral du système. Tellement facile quand on ne comprend rien à son propre programme.
Pour la candidate du Front National, le problème est un peu différent. Elle connait son programme, mais semble avoir ignorée les rouages basiques de l'économie pour le construire. Lors de l'émission Des paroles et des actes, le journaliste économique François Lenglet l'interroge sur la sortie de l'euro, mesure phare de son programme. Celle-ci se lance alors dans une fumeuse démonstration sur les gains, en terme de compétitivité, d'un retour au franc. Mais quand le journaliste l'interroge sur le risque d'une dévaluation pour l'épargne des ménages, elle rassure : un franc = un euro. Sauf que dans ces cas là, il n'y a plus de dévaluation donc aucun gain de compétitivité. Et la candidate Front National semble, au passage, s'affranchir du régime flottant des monnaies. Un franc = un euro, ça ne durerait pas bien longtemps. Embourbée, Marine Le Pen préfère s'en prendre à Lenglet, forcément un europhile et libéral du système. Tellement facile quand on ne comprend rien à son propre programme.
Mais les "petits" candidats ne sont pas en reste. Au premier rang d'entre eux, tout le monde pense évidemment à Eva Joly, l'ancienne juge d'instruction, et candidate d'Europe Ecologie Les Verts. On ne pourra pas passer à côté de sa chute, à la sortie d'un cinéma, dimanche dernier. On lui souhaite évidemment bon rétablissement, mais on se dit quand même que pareille mésaventure ne pouvait arriver qu'à elle. A l'image de sa campagne. Cela vient couronner une succession de bourdes sans fin, dont l'avant dernière était sa confession publique, en plein meeting, de faire une mauvaise campagne ! Tout le monde le sait, mais elle aurait pu attendre quelques semaines quand même. Et cela s'ajoute à une succession quasi ininterrompue de bévues depuis sa nomination : Suppression du 14 juillet, "Je ne crois plus que je puisse devenir présidente", "On va me donner le ministère des sports", "Corinne Lepage, je l'emmerde"... Nadine Morano aurait-elle trouvé son maître ?
Les deux candidats trotskistes (pourquoi en faut-il deux d'ailleurs ?) sont également bien placés pour obtenir la palme. Honneur au femme, parlons d'abord de Nathalie Arthaud. Elle a la lourde tâche de succéder à Arlette Laguiller, 5 fois candidate à l'élection présidentielle, pour représenter Lutte Ouvrière. Du classique dans son programme : interdiction des licenciements et compagnie. Sauf que de son état civil, la candidate LO est professeur d'économie et de gestion. Ça laisse songeur de voir celle-ci formuler pareilles mesures, qu'on ne trouve évidemment dans aucun livre d'économie. L'autre candidat trotskiste, c'est Philippe Poutou, du NPA, le Nouveau Parti Anticapitaliste. Comme il peine à se faire connaitre, une fois sur deux, c'est Olivier Besancenot qu'on envoie dans les médias. On se demande lequel des deux est candidat. Mais quand Poutou vient en personne dans les studios de RTL la semaine dernière, on reste sans voix. Jean-Michel Apathie lui même semblait tomber des nues. Sur la question de la dette, le candidat NPA a la solution : "On ne rembourse pas". Apathie relance : "Vous voulez dire qu'on ne rembourse pas les intérêts des emprunts". Poutou répond : "Oui...et le reste non plus". Le journaliste tombe par terre : "On ne rembourse rien !?". Poutou : "Non, rien. On fait comme les grecs". Tout est dit.
Enfin, un candidat est venu d'une autre planète : Jacques Cheminade. Après une première candidature en 1995, le voici donc de retour pour une nouvelle tournée. Et dans son programme, figure très officiellement le projet de coloniser Mars. Sauf qu'aux dernières nouvelles, sur cette planète, il n'y a pas d'air. Lui n'en manque pas en tout cas.
La semaine dernière un journal britannique tout ce qu'il y a de plus sérieux dénonçait le niveau pitoyable de la campagne électorale. The Economist titrait en effet à propos de la présidentielle française : France in denial. Avec en image de fond Hollande et Sarkozy en personnage du tableau d'Edouard Manet, Le déjeuner sur l'herbe. Oui, la France est dans le dénie. Mais corrigerons. Les français ne le sont pas, pour beaucoup. Et dans leur fort intérieur, les principaux candidats ne le sont pas non plus. Mais visiblement, il n'est pas possible de faire une campagne sérieuse et de vérité. Chaque candidat se regarde donc, attendant que l'autre fasse la faute, et parle le langage de vérité, ce qui signerait son arrêt de mort électoral. Résultat, la campagne est dans l'impasse, puisque les vrais enjeux et controverses de campagnes sont délibérément cachés aux électeurs. On est dans une situation assez surréaliste où la France, dans l'oeil du cyclone pendant des mois sur le problème de la dette et du AAA, "trésor national", parle maintenant de tout dans cette campagne, sauf de cela. Comme si cette élection était une courte période d'accalmie et de rêverie au milieu d'une tempête bien réelle. On escamote ainsi le seul sujet qui sera sur la table au lendemain de l'élection : la crise de la dette et l'inévitable plan de rigueur qui sera mis en place, quelque soit le vainqueur.
Une campagne n'importe quoi !
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