jeudi 24 novembre 2011

Du bon usage de la primaire

Il y a quelques semaines, s'achevait en fanfare la primaire "ouverte" socialiste pour designer le candidat à l'élection présidentielle. Nous avons frôler parfois la saturation médiatique, tant les médias ont cette capacité à se polariser sur un sujet. En oubliant souvent le reste de l'actualité. Fâcheux dans un contexte de crise.

Néanmoins, en mobilisant 2,5 millions de Français, on ne peut guère contester que cette opération fut un succès pour ses organisateurs et a rempli son rôle : trouver un candidat à un PS en manque de leadership et sans candidat naturel. Bien élu (à 56%), sans pour autant humilier son adversaire Martine Aubry, François Hollande paraissait mis sur orbite pour les élections présidentielles.

Le succès de ces primaires "ouverte" poussa certains à s'en attribuer la paternité : Terra Nova, le Think Thank proche du parti socialiste, Ségolène Royal avec sa démocratie participative, Arnaud Montebourg qui ne jure que par les primaires et la 6ème république depuis son plus jeune âge. Même le valeureux Jean-Michel Baylet (0,64%) ne manqua pas de signaler que lui et le PRG avaient été les premiers à la demander. Martine Aubry pouvait revendiquer qu'elle l'avait décidée quand personne n'en voulait. Et François Hollande qu'il l'avait gagnée. Même à droite, François Fillon admettait qu'il serait nécessaire d'en faire en 2017. Jean-François Copé, plus difficilement, l'admettait également.

Je ne trancherai pas sur la paternité. La primaire est en vigueur depuis une éternité aux Etats Unis au sein des partis Démocrate et Républicain. Et en France, on se souvient que le RPR Charles Pasqua poussait déjà l'idée en 1986...

Pour Terra Nova, le bilan n'est, ni plus ni moins, qu'un "coup d'essai et coup de maître". Elle ambitionne désormais de promouvoir des primaires à tous les échelons (locaux et nationaux). Le parti socialiste n'est pas en reste sur le succès de ces primaires qui a fait émerger selon elle une "dream team", en toute modestie. Les éditorialistes et commentateurs politiques saluent tous dans un même élan, ce grand et bel exercice de démocratie, dans un enthousiasme parfois un peu béat.

Et voilà que nous apprenons cette semaine que Ségolène Royal, déjà parachutée pour les législatives 2012 dans la circonscription de la Rochelle va être exemptée de primaire. Au détriment des élus socialistes locaux. Plusieurs semaines d'intense catéchisme sur le bienfait démocratique des primaires, que plus rien ne sera jamais comme avant, que la désignation des candidats ne se fera plus jamais dans un bureau d'apparatchik de parti. Et voilà que les nominations venues d'en haut, les passes droits pour certains, reprennent le dessus quelques semaines plus tard. Au nom des intérêts supérieurs du parti se défend-t-on comme on peut au PS. Les 7% de Ségolène Royal le valent bien. Les militants PS locaux de la Rochelle apprécieront.

François Hollande, lui, voit sa cote dégringoler ces derniers jours. Au point de voir fondre quasiment tout l'effet primaire engrangé pendant des semaines. Celles-ci devaient être une rampe de lancement pour susciter l'engouement autour du candidat. C'est plutôt raté. L'effet primaire n'a pas duré. Mais il y a plus grave. En organisant une élection 7 mois avant la vrai, le PS a suscité un engouement pour l'homme, le héros, du moment. Comme c'est le propre de chaque élection. Mais le propre de chaque élection est aussi, quelques mois après, de détester ce qu'on avait adoré. C'est la déception. François Hollande est donc en train d'aborder l'élection dans une pente descendante, quand le candidat Sarkozy sortira du bois au dernier moment, suscitant peut être cet engouement propre au vainqueur au moment de l'élection. Il ne faut pas se tromper d'élection et déboussoler les électeurs.

La primaire n'est enfin pas l'assurance de choisir le bon candidat. Celle d'Europe écologie les verts en est l'exemple. Les militants et sympathisants verts ont préféré se porter vers l'écolo-orthodoxe Eva Joly plutôt que sur le médiatique Nicolas Hulot. Le risque de la primaire est de voter pour son candidat préfèré plutôt que sur celui que préféreront l'ensemble des électeurs. Bilan, la candidate écolo dérape, devient incontrôlable, et ne décolle pas dans les sondages. On peut raisonnablement douter qu'elle soit encore présente dans la campagne en Avril prochain.  Les verts sont d'autant moins pardonnables qu'ils sont récidivistes en la matière. Se souviens-t-on qu'en 2002, le choix des militants s'était porté vers Alain Lipietz, aux déclarations hasardeuses, notamment sur l'amnistie des nationalistes Corses. Remplacé au pied levé par Noël Mamère, plus fin politique.

Du bon usage de la primaire...


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