mardi 6 décembre 2011

L'aléa moral de la zone euro

La zone euro vit depuis des mois dans un mythe, celui que les Etats rembourseront les dettes contractées. C'est faux, ils ne rembourseront évidemment pas, il n'y aura pas de retour à l'équilibre.

La croissance économique des pays de la zone euro est très faible alors que les taux d'intérêts pour financer leur dettes ne font que grimper. Et rien ne semble pouvoir enrayer cette montée. Tous les pays renégocient en permanence leurs dettes, on parle alors de restructuration. Mais, il devient de plus en plus probable que nombre des pays européens feront partiellement défauts. Si ce n'est pas même le défaut complet, comme c'est en réalité déjà le cas dans une Grèce en perfusion de l'Union européenne et du FMI.

Pourtant la Banque Centrale Européenne (BCE), sous l'égide de Jean-Claude Trichet d'abord et désormais de Mario Draghi, est intervenue sur les marchés pour racheter massivement de la dette, notamment italienne et espagnole. Mais rien n'y fait. Malgré cette intervention censée soutenir artificiellement les taux, ceux-ci ne redescendent pas.

Mais cette intervention de la banque centrale au fait, sert-elle vraiment la cause qu'elle entend soutenir ? Analysons cette intervention. 

Au début, plusieurs pays européens (Italie, Espagne pour ne citer qu'eux) se trouvent en difficulté sur le marché des obligations souveraines (emprunts d'Etat). Fortement endettée, avec des perspectives de croissance faible, ils attirent moins les investisseurs. Sans pour autant présenter de risques sérieux de défauts à court terme, leurs taux d'intérêts vont logiquement monter sur le marché des dettes souveraines. Conséquence, ils auront plus de mal à se financer sur le marché de court terme.

Pour aider ces pays en difficultés, la BCE décide d'intervenir et de faire baisser les taux des dettes à court terme de ses pays. Pour cela, le mécanisme est simple, il suffit de racheter via les banques centrales de ces pays de la dette détenue par les banques privés. Effet attendu, les taux doivent baisser et ces Etats peuvent à nouveau se refinancer sans être asphyxier, leurs obligations devant trouver plus facilement preneur. Effet constaté en réalité, les taux ne baissent pas et continuent même à monter. Pourquoi ? 

Parce que ces pays sont déjà très endettés, et ne respectent pas les réglementations européennes. Et plutôt que de se restructurer profondément et geler leurs dépenses, ils vont continuer à s'endetter sur les marchés pour financer leurs déficits courants. Et ce, alors que les perspectives de croissance sont mauvaises, n'offrant que peu d'espoir de rentrée de recettes et de retour à l'équilibre dans les mois ou années qui viennent. Cette entourloupe de la BCE n'échappe cependant pas aux investisseurs privés, qui ne vont pas ce précipiter vers ces obligations à l'évaluation falsifiée. Conséquence, l'intervention de la BCE fait davantage fuir encore les investisseurs. Les taux continuent de monter. Et l'argent de la BCE n'a été qu'un coup d'épée dans l'eau.

Nous sommes là dans un cas typique d'aléa moral qui affectent considérablement la zone euro. On explique souvent mieux l'aléa moral avec l'exemple de l'assurance. Un sociétaire va souscrire à une assurance qui l'engage à respecter un contrat en échange d'une couverture. Mais après signature, le sociétaire, se sentant protégé, va parfois dévier et avoir un comportement à risque. Cette déviation est l'appelé Aléa moral. La justice peut alors condamner cette déviation, ce qui incite chaque individu à respecter son contrat.

Dans le cas présent, les Etats de la zone euro qui n'ont pas respecté les engagements du pacte de stabilité européens (3% de déficit budgétaire, 60% du PIB d'endettement) et qui ne se sont pas restructurés sont in fine sauvés par une zone euro et une BCE qui refusent toute perspective de défaut de l'un de ces membres. D'où les plans successifs de sauvetage, et le rachat de dettes. Le tout en pur perte bien sûr. Plutôt que d'être sanctionné, et d’éventuellement faire défauts, ces Etats ne sont incités qu'à continuer leurs comportements déviants en s'endettant à peu de frais.

Il existe pourtant un organe européen qui doit, dans l'avenir, jouer un rôle majeur. C'est la Cour de Européenne de Justice, basée au Luxembourg. C'est ce pouvoir judiciaire, qui doit avoir pour mission de faire respecter les engagements de tout les contractants. Et les sanctionner si besoin.

Arrêtons de chercher des boucs émissaires, un des problèmes européens, c'est l'aléa moral.

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