lundi 5 décembre 2011

Maastricht, vingt ans après

1992 - 2012.
L'année prochaine nous fêterons le vingtième anniversaire du "Oui" au référendum de Maastricht, ratifiant la création de la monnaie unique en Europe. Nous avons connu l'Ecu quelques années. Puis ce fut l'Euro.

On se souvient encore de cette campagne électorale, de ce volumineux document du traité européen que tous les citoyens avaient reçu dans leur boite au lettre, sans rien y comprendre. L'enjeu disait les partisans du "Non", c'était l'abandon de la souveraineté de la France au profit du fédéralisme européen et de la commission de Bruxelles. Pour les partisans du "Oui", c'était l'aboutissement du vieux rêve européen et la réconciliation achevée de la France et de l'Allemagne, durement ravagés par les guerres du XXème siècle.

Le monde politique s'étripa sur pendant la campagne. Les trois mousquetaires de la droite souverainiste, Philippe Séguin, Charles Pasqua et Philippe de Villiers font campagne pour le "Non" contre l'avis des appareils RPR et UDF. Un quatrième (D'artagnan ?), Jean-Pierre Chevènement, le souverainiste de l'autre rive, se joint à eux. Ils vont faire trembler le pouvoir mitterandien, mais aussi les états majors de droite à mesure que les courbes du "Non" grimpent, jusqu'à dépasser pendant un moment le "Oui" dans les sondages.

Dans le camp du "Oui",  les européens de cœur tout d'abord. Une partie du PS emmené, Jacques Delors, président de commission de européenne, et la fédéraliste UDF de Valéry Giscard d'Estaing, Simone Veil et François Léotard. Il y a aussi les européens de raison. Le président Mitterrand, pas européen historique, mais qui aura un engagement incontestable dans la construction européenne et la réconciliation avec l'Allemagne d'Helmut Kohl. Tout le monde se souviens de leur photo main dans la main à Verdun. Il a aussi le peu fédéraliste RPR de Jacques Chirac. Le parti est divisé sur le référendum, mais le futur président sent qu'il ne sera pas présidentiable en 1995 s'il appelleà voter "Non". Les jeunes loups comme Alain Juppé et Nicolas Sarkozy le suivent dans sa démarche.

Malgré la puissance des appareils PS, RPR, UDF, les français ne suivent pas aussi facilement. Ce sera finalement un "Oui" du bout des lèvres. A 51%. La France souverainiste existe. Elle n'a perdu que de peu. La France adopte donc la monnaie unique. Celle-ci est pleine de promesse. Elle annonce une Europe monétaire intégrée, la fin de l'inflation et des dévaluations compétitives. Mais il y a des contraintes. Le déficit budgétaire ne doit pas excéder 3% et les dettes ne doivent pas aller au delà des 60% du PIB. La convergence des pays européens adoptant l'Euro est en route.

Mais c'est une victoire à la Pyrrhus. Les peuples ont accepté la monnaie unique. C'est vrai que c'est plus simple, et plus pratique pour voyager. Mais ils n'ont pas accepté la perte de souveraineté ni les contraintes drastiques de la commission et des argentiers de la banque centrale.

Or cette Europe se construit en l'absence d'un vrai pouvoir de contrainte en cas de non respect de ses engagements. Les dirigeants politiques, élus par leur pays et non par toute l'europe, vont dès lors prendre leur distance avec ces critères de convergence. Puisqu'on ne peut plus dévaluer en cas de problème comme au bon vieux temps, on pioche dans le déficit encore et encore. Créant des dettes de plus en plus abyssales. Pour rassurer les quelques esprits chagrins s'en inquiétant, on assène qu'un État ne peut pas faire faillite.

Aujourd'hui, avec la crise de l'Euro et des dettes souveraines, le débat du traité de Maastricht n'a jamais été aussi actuel. Dans son discours de Toulon cette semaine, Nicolas Sarkozy pointe les manquements du traité, le problème de la dette et le manque d'intégration européenne, notamment la convergence avec l'Allemagne. C'est en partie le bon diagnostique, mais c'est tard, et il a lui-même adhéré à cette Europe depuis vingt ans en soutenant la ratification de ce traité et sans réduire les déficits.

Vingt ans après, c'est le match retour entre les souverainistes et les fédéralistes. Ces derniers, poussent vers une intégration plus complète avec l'Allemagne sur les reformes sociales (retraites, temps de travail) et fiscales (Impôt, TVA), assortie de coupes sévères dans les dépenses publiques pour redresser les comptes. C'est en partie la voie proposée actuellement par les dirigeants européens, Nicolas Sarkozy compris. Le PS de François Hollande se positionnera probablement sur cette ligne. Il decevra sans doute les plus à gauche, mais il n'a pas vraiment le choix.

Dans le camp souverainistes, c'est plus flou. Seguin n'est plus de ce monde, De Villiers et Pasqua sont plus ou moins rangés des camions, et Chevenement fait peut être la campagne de trop, si toutefois il va au bout. Les héritiers émergent et porteront probablement le fers dans les mois qui viennent. Que ce soit à droite ou à l'extrême droite, les Nicolas Dupont Aignan et Marine Le Pen ou à gauche Arnaud Montebourg et Jean Luc Mélenchon. Attention toutefois, cet attelage avec gagné sur le "Non" du référendum de 2005.

Nous tenons peut être là le futur grand débat de la présidentielle. Vingt ans après.

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