mardi 31 janvier 2012

Sarkozy a-t-il déjà perdu ?

Y aurait-il comme un doute dans la tête du président sortant ? Bien qu'il s'en défende, il faut bien se rendre à l'évidence que les choses se présentent mal pour lui.

Il y a d'abord cette crise économique et financière qui n'en finit plus depuis maintenant l'été 2008 et la faillite retentissante de Lehman Brothers. On en avait même aperçu les premiers soubresauts en août 2007. Les subprimes donnaient alors des signes de faiblesse sur le marché américain. Nicolas Sarkozy, tout juste installé à l'Elysée, ne se doutait pas qu'il ne sortirait plus la tête de l'eau. Car la crise s'est impitoyablement abattue sur la France comme sur le reste de l'Europe. Grossissant des dettes que les Etats avaient le plus souvent renoncé à contrôler et juguler, la crise financière a durement frappé l'économie réelle. 

La France n'y échappe évidemment pas. Un chômage qui ne cesse d'augmenter et se porte maintenant à près de 10%, une dette qui creuse de 500 milliards d'euros pour atteindre 1700 milliards d'euros. L'horizon est sombre. Les opposants du président le tiennent évidemment pour responsable de cette situation. C'est de bonne guerre. Il y a parfois du vrai d'ailleurs. Certaines niches fiscales coûtent chers et n'ont que peu d'effets (TVA réduite pour la restauration, niche Copé...), d'autres ne coûtent pas si cher mais sont symboliquement dures à défendre en période de vaches maigres (Bouclier fiscal...). Maintenant, si nous examinons la situation d'autres pays, on s'aperçoit sans surprise que leur taux de chômage a fortement augmenté, souvent plus qu'en France (Espagne, Italie, Grande Bretagne...) , et que leur dette s'est aussi fortement accrue (Espagne, Etats Unis). Sa responsabilité n'est donc pas exclusive et est donc à nuancer. 

Néanmoins, si l'on se réfère aux élections récentes, les peuples n'ont guère chercher de circonstances atténuantes à leurs dirigeants politiques, fusibles de premier choix en cas de pareil marasme économique. Socrates au Portugal, le parti socialiste de Zapatero en Espagne, Berlusconi en Italie ou Papendreaou en Grèce. Tous se sont vu signifier l'arrêt (momentanée) de leurs activités à la tête du gouvernement, quelque soit la justesse de leurs politiques pendant la crise. Il est d'ailleurs intéressant de constater que leurs remplaçants poursuivent les politiques de rigueur qu'ils avaient initiées. It is the economy, stupid. Le président Sarkozy a donc beaucoup de soucis à se faire. 

Face à lui, le candidat socialiste François Hollande est au zénith dans les sondages et favori de toute la presse. Il n'a pas donné beaucoup de signes de faiblesse jusqu'à présent. Et il le sait, la crise économique joue pour lui, et il peut compter sur le renfort des anti-sarkozystes qui continuent 5 ans après de se rappeler du Fouquet's ou yacht de Bolloré. Ces erreurs initiales d'affichage du président, qui n'était d'ailleurs pas encore investi président, il les portera donc jusqu'au bout. Si la situation économique était meilleure, les gens auraient pu oublier. Mais là non, en ses temps de disette, c'est resté, même si c'est loin maintenant.

Malgré tout, François Hollande a bâti un programme. Le programme se veut rigoureux, mais ce n'est pas pour autant la rigueur, et encore moins l'austérité tant redoutée. A contre-temps par rapport aux mesures prises par nos voisins européens, le programme socialiste propose de nouvelles dépenses. Il est néanmoins jugé plutôt responsable par l'opinion. Sans doute à tort. De plus, le candidat socialiste s'est très bien préparé et semble avoir tiré les leçons de la campagne désorganisée de Ségolène Royal en 2007. Il sait faire campagne et est un débatteur hors pair. Il l'a encore démontré la semaine dernière contre Alain Juppé qui n'a pas véritablement trouvé l'angle d'attaque pour le déstabiliser. Bref ça plane pour Hollande. Mais peut être un peu trop.

En effet, voulant montrer un visage d'assurance, il est parfois passé pour trop sûr de lui, trop sûr de sa victoire. Comme s'il s'y voyait déjà, ignorant presque qu'il y a un président encore en exercice. Il est surprenant qu'un politique expérimenté comme Hollande soit tomber dans cet excès de confiance. Il doit pourtant savoir qu'une campagne électorale n'est jamais jouée à l'avance et que les électeurs détestent qu'on choisisse à leur place. Il l'a même expérimenté en conduisant comme premier secrétaire du PS la désastreuse campagne électorale de Lionel Jospin en 2002. Ce dernier était pourtant sûr de gagner.

On peut aussi se replonger dans les archives de 1995. Fin Janvier, le candidat Balladur pointait à 35% dans les sondages contre 13% pour Jacques Chirac. Arlette Chabot demandait même à ce dernier s'il comptait aller jusqu'au bout de sa candidature. Philippe Seguin, en campagne pour Chirac, provocateur, lance alors : "il parait qu'il y a une élection présidentielle, mais le vainqueur a déjà été désigné par les commentateurs, elle n'a plus lieu d'être". Les électeurs se révoltent contre ce scénario trop bien écrit à l'avance et on sait ce qu'il adviendra. De quoi rassurer un peu le candidat Sarkozy qui toutefois, contrairement à Chirac en 1995, est le sortant, avec une crise sur le dos et une opinion durablement hostile. Oui, il est mal barré...

jeudi 26 janvier 2012

La campagne électorale cherche sa "controverse"

Petite annonce : Campagne électorale moribonde cherche controverse. Urgent. S'adresser aux candidats.

Julien Vaulpré, ancien conseiller opinion de Nicolas Sarkozy et fondateur du cabinet de conseil Taddeo, livrait dans le journal Le Monde une analyse intéressante sur la campagne électorale en cours. Il a surtout sorti le mot clé pour matérialiser ce sur quoi se jouait une campagne. Il parle ainsi de "controverse". Et la question est donc : quelle sera le moteur de la campagne, c'est à dire sur quelle "controverse" va émerger le vainqueur ?

Dans un post précédent, nous parlions effectivement de la nécessité, lors d'une campagne électorale, de porter un certain nombre de valeurs (par exemple le travail, le mérite, la justice sociale...) et de grands thèmes. Ce qui est exacte, mais à condition que ces sujets fasse débat et soit clivant dans l'opinion. Par le passé, des campagnes électorales ont pu basculer ou se sont jouées sur une controverse qui a vu un des candidats sortir vainqueurs du débat. Quelques exemples nous viennent à l'esprit. 1995, Jacques Chirac, donné archi-battu face à Balladur lance le thème de la fracture sociale et arrive à l'incarner aux yeux de l'opinion. Balladur passe complètement à côté de ce mouvement de fond. Et les courbes s'inversent en Février. Chirac passe devant et gagnera l'élection. En 2002, Chirac est moribond face à un Lionel Jospin qui n'a pas été grillé par 5 ans de Matignon. Le président sortant fait campagne sur l'insécurité. Jospin néglige le thème. A gauche on parle de "sentiment d'insécurité". La sanction sera sans appel. Dernier exemple en date, 2007. Nicolas Sarkozy lance une double offensive. D'abord contre les 35 heures (Travailler plus pour gagner plus). Puis sur l'identité nationale (Proposition de la création d'un ministère de l'immigration, et de l'identité nationale). C'est un taulé chez ses adversaires (Royal, Bayrou). Mais l'opinion suit, et Nicolas Sarkozy devient président.

Revenons à l'élection présente. Ce qui frappe pour l'instant, c'est l'absence de controverses. Nous ne sommes il est vrai qu'au début de la campagne, et l'un des principaux candidats, Nicolas Sarkozy, n'est pas encore déclaré. Mais il est déjà candidat malgré tout. Ce n'est pas qu'il n'y a pas d'opposition droite-gauche. Il y en a de multiples en ce moment (Quotient familial, TVA social, fiscalité...). Mais rien de vraiment structurant dans l'opinion qui fasse apparaitre les clivages de fonds de la société française.

Quelques grands thèmes ont pourtant été lancés depuis quelques semaines. On pense notamment au "Made in France" de François Bayrou. Mais il a été repris par François Hollande, Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen. Pas de controverse possible donc. François Hollande a tenté dans son discours du Bourget de cliver l'opinion sur la finance. Mais Nicolas Sarkozy et sa Taxe Tobin avait déjà lancé le mouvement. Et les autres candidats suivent. Toujours pas de controverse. Dernier thème qu'essaye d'incarner François Hollande : la jeunesse. Mais qui est contre la jeunesse ? Non, vraiment pas de controverse la dessus.

L'apparition d'une controverse est absolument indispensable pour structurer l'opinion et faire l'élection. Il semble pour l'instant que ce soit la crise qui domine et inhibe les candidats. Le vainqueur sera celui qui saura trouver le bon angle d'attaque, et aura donc compris le vrai mouvement de fonds de l'opinion. Les conseillers opinions ont encore de beaux jours devant eux...

mercredi 25 janvier 2012

2012 : Haro sur le système !

Dans cette drôle de campagne électorale, qui a commencé sans avoir commencé, une posture semble néanmoins se dégager chez tous les candidats : Ils combattent le "système". Et il y a beaucoup de combattants. Il y a les combattants de gauche, de droite, du centre, d'extrême gauche, d'extrême droite et même d'extrême centre.

Mais au fait, c'est quoi le système ? Eh bien ça dépend. Vous allez voir.

A la pointe du combat il y a bien entendu les deux corsaires Jean Luc Mélenchon du Front de Gauche et Marine Le Pen du Front National. Pour eux, tout est à combattre, tout est à jeter, tout est à vomir. S'ils ne sont pas d'accord sur les solutions (quoique ?) ils le sont sur les ennemis à combattre : l'UMPS (UMP + PS), les médias ("salaud de journalistes", "tous vendus"), les banques, les financiers, les spéculateurs, les patrons voyous, les élites politiques corrompus, la commission de Bruxelles, L'Europe libérale, le libre-échange, la banque centrale européenne et son euro fort... Bref le système c'est à peu près tout, et tout ça est à jeter d'un bloc. ça a le mérite d'être simple (même très simple) pour l'électeur de base peu regardant et parfois lassé des errements des hommes politiques disons "institutionnels".

Phénomène nouveau, nous assistons à l'apparition des anti-systèmes du centre. Et même, disons-le de l'extrême centre, puisque c'est ainsi qu'aime à se définir François Bayrou. Lui, il a été dans le système, il y a très longtemps, mais maintenant plus du tout. Dix ans qu'il est en rébellion contre la droite chiraquienne puis sarkozyste, coupable de lui barrer la route vers son rêve Elyséen. Alors il tente de rejouer sa partition de 2007. Le système à abattre pour lui, c'est cette droite UMP, qu'il n'a pas voulu rejoindre et qui occupe le pouvoir à sa place. C'est aussi cette élite "médiatico-parisienne", coupable de connivence avec le pouvoir (et l'opposition), et surtout coupable de rire à l'idée que lui, le béarnais puisse un jour accéder à la plus haute fonction de l'état. Toujours au centre, mais moins extrême, il y a les anti-systèmes de fraîche date, tel Hervé Morin, qui a basculé lui aussi suite suite à son éviction du poste de ministre de la défense à l'automne 2010. Mais bon là, ça ne prend pas. Etre hors système, ça prend du temps. Il faut une traversé du désert, dire tout le mal qu'on pense d'un tas de gens avec qui on gouvernait autrefois. Pas si simple. Conséquence, c'est le régime sec : 0%.

A gauche, François Hollande tente une délicate synthèse en se présentant en anti-système, mais raisonnable, celui qui sait que bon quand même il en fait un peu parti de ce système et aussi que bon il a des chances d'être élu et d'avoir à en hériter. Lors de son discours au Bourget, il a donc désigné son seul ennemi, celui qui incarne le système qu'il va combattre : ce sera la finance. Ni plus ni moins.

A droite, il y a là aussi des anti-systèmes. Et certains se donnent du mal. Nicolas Dupont Aignan, président de débout la république a fait des efforts méritoires qui mérite d'être souligner. Il a quitté l'UMP en 2007, coupé les ponts avec Nicolas Sarkozy, et critiqué pratiquement tout ce qu'il a fait. Le système à combattre, c'est donc cette droite et cette gauche fédéraliste, coupable d'avoir introduit l'euro et d'obéir à la commission européenne. Effort mal récompensé cependant, il pointe à 0,5% dans les sondages. Autre anti-système qui tente de prendre son envol, et avec vigueur : Christine Boutin. En admiration devant le président lorsqu'elle était ministre, elle se dresse désormais contre le pouvoir, coupable de plein de choses, mais surtout de l'avoir sorti sans ménagement du gouvernement lors du remaniement de 2009. Du coup elle tape sur ce pouvoir sarkozyen qui ne l'écoute plus. Et menace même de soutenir François Bayrou. Une extrémiste je vous dis. Reste le cas Dominique de Villepin. Ancien premier ministre, vous allez me dire que c'est un peu dur d'être anti-système. Eh bien pourtant si. Son système à lui, c'est Nicolas Sarkozy, ennemi juré qu'il a affronté jusque dans les prétoires pour l'affaire Clearstream. Il se pose désormais en persécuté du régime. Les médias l'invitent d'ailleurs partout pour s'en plaindre. Laxiste le régime.

Reste un cas. Celui de Nicolas Sarkozy, dont nul ne doute qu'il sera candidat à sa succession d'ici quelques semaines. Et là, il faut bien admettre qu'étant président sortant, il faudrait être sacrément gonflé pour se présenter en candidat anti-système, . Et pourtant, c'est aussi en partie la partition qu'il pourrait jouer. Et il n'a pas le choix. Les français sont dans l'ensemble plutôt mécontents du bilan du sortant. S'il apparaît trop comme le sortant, il est mort électoralement. Mais il a d'autres angles d'attaques qu'il pourra toujours jouer : le système à combattre pourrait alors être dans sa bouche le conservatisme de la fonction publique et le conservatisme syndicale, incapable de se réformer, les médias qui ne sont guère bienveillants avec lui depuis 5 ans, ou encore la finance, à qui il veut appliquer une taxe Tobin sur leurs transactions. Punition pour lui avoir gâché son mandat avec une crise (celle de 2008, pas celle de 2011). Vous allez voir, quand il s'agit de combattre le système, les hommes politiques savent être créatifs. Ce n'est pas forcément le cas lorsqu'il s'agit de bâtir un programme, mais nous nous égarons...

Finalement, tous ces anti-systèmes nous ramènent aux élections américaines. Il est en effet conseillé, et même recommandé aux candidats, républicains comme démocrates, de fustiger Washington et son pouvoir central, réputé éloigné des réalités quotidiennes et de la vie de l'américain moyen. Sauf que généralement, ces candidats ne sont autres que des sénateurs ou membres de la chambres des représentants, et donc eux mêmes parmi cette élite de Washington. Cela peut même devenir cocasse. En 2004, le président sortant Georges W. Bush fustigeait pendant sa campagne ce fameux "Washington" déconnecté des réalités... Et le candidat-président Obama fera certainement de même cette année. Succès toujours garanti dans le urnes que de s'afficher en opposant du système. Surtout lorsqu'on en fait parti.

Une question subsiste encore: face à tous ses combattants ou pseudo combattants, qui défend le système ? Apparemment personne. Pourtant, nous savons d'expérience, qu'une fois l'élection passée, le vainqueur s'accommodera fort bien du système. L'ennemi juré de la 5ème république et des "puissances de l'argent", François Mitterrand, s'en ai parfaitement accommodé, conservant l'un, et libéralisant l'autre...

lundi 16 janvier 2012

Après la perte du triple A

Cela devenait le feuilleton, un peu lassant, de ces derniers mois : la France va t-elle perdre son triple A ?

Cette fois ça y est, c'est officiel, la France a été dégradée d'un cran, avec perspective négative dans les 6 mois, par l'agence américaine de notation Standards & Poors. Elle ne pointera donc plus qu'avec le rating de AA+, c'est à dire finalement comme les Etats Unis (on ne sait trop dire si c'est bon signe d'être comparé à la première puissance mondiale, mais aussi une des plus endettées et en proie au doute...).

On pourrait longuement disserter sur ces agences de notations, si décriées depuis des mois et jugées coupables de tout ou presque. D'abord, elles feraient des erreurs et avaient noté AAA les produits toxiques subprimes. Oui, c'est vrai, mais elles ne les avaient tout de même pas inventées ces mauvais produits. Il y a plus coupable qu'elles dans cette histoire. Ensuite, leurs jugements seraient victimes d'un phénomène auto-réalisateur : les catastrophes ont lieu parce qu'elles l'ont publiquement diagnostiquées. Nous pouvons observer que c'est largement faux. L'Italie et l'Espagne ont dévissé sur leur spread bien avant que les agences ne donnent leurs sentencieux verdicts. Elles seraient aussi en décalage avec la réalité des marchés et des décisions politiques. C'est vrai et faux. Vrai parce que la dégradation de la France, de l'Espagne et de l'Italie vendredi dernier correspondait précisément à une période de détente sur les taux souverains. Et faux parce que l'annonce de plans d'austérités pour rassurer les marchés ne certifie pas pour autant une bonne appréciation. Le gouvernement doit aussi donner des gages que le plan sera effectivement mis en oeuvre. Et accessoirement il convient de vérifier que celui va dans la bonne direction. Mais finalement, elles sont aussi et surtout les boucs émissaires faciles de sociétés occidentales intoxiquées à l'endettement facile et colossale. Incapable de sortir de cette spirale infernale, elles se sont mis à la merci des marchés, oui c'est vrai, mais précisément parce qu'elles l'ont sollicité. A la vérité, les agences ne sont guère que des analystes parmi d'autres (cabinets spécialisés, journalistes financiers...), et leur verdict est un jugement, parmi d'autres, qui est pris en compte par le marché, pas forcément suivit.

A la vérité, les écarts de spread, depuis plusieurs mois déjà, de la France par rapport à l'Allemagne indiquait que la France n'empruntait déjà plus comme un pays AAA. Il ne faut pas inverser l'ordre des choses. On est noté AAA pour emprunter à moindre coût. Si ce n'est pas le cas, c'est que la note n'a aucune signification. Ce qui était le cas pour la France. Nous assistons juste à un tardif réajustement. Qui pourrait également être confirmé par les deux autres grandes agences (Fitch Ratings et Moody's). Mais comme je le signalais dans un précédent post, Dagung (une agence chinoise) a réajusté la note française il y a déjà plusieurs mois de cela. Il est donc à souhaiter que cette "officialisation" de la mauvaise nouvelle que tout le monde savait déjà soit un électrochoc dans les décisions politiques des prochains mois, à commencer par les programmes des candidats à l'élection présidentielle. 

En fait, deux questions se posent maintenant. Pourquoi cette dégradation ? Et comment récupérer cette précieuse  et symbolique note ?

Standards & Poors s'est expliqué sur les motifs de cette dégradation. 9 pays de la zone euro ont vendredi été dégradés, certains d'un cran (France, Autriche), d'autres de deux (Italie, Espagne, Portugal). Il y a donc un phénomène général qui touche une zone euro malade. L'agence indique que, selon elle, les mesures décidées au sommet européen du 9 décembre sont insuffisantes. L'accent avait été alors mis sur la réduction des déficits budgétaires, ce qui est nécessaire, mais pas insuffisant. L'austérité n'est pas le seul levier d'action pour rétablir les comptes. L'agence pointe en effet un déficit de compétitivité au sein même de la zone euro, principalement des pays du sud, mais aussi de la France, vis à vis des pays du nord, notamment de l'Allemagne. C'est sur ce volet de la compétitivité qu'il convient également d'agir. La clé est donc une cure d'austérité, complétée impérativement d'une amélioration de la compétitivité, sous peine de rester dans des croissances faibles ou nulles. Autre raison également évoquée par Standards & Poors : le rôle de la BCE (Banque Centrale Européenne) et du FESF (Fonds Européen de Stabilité Financière) est pour l'instant jugé illisible. C'est pas faux. 

Maintenant, pourquoi l'Allemagne, les Pays Bas ou la Finlande ont gardé leur précieuse note et pas la France ? La réponse semble être double. D'une part la France semble souffrir une politique économique relativement peu lisible, d'où un léger repli dans le volet de la note consacré à la confiance envers les institutions. En effet, comme je le signalais dans un précédent post, le plan de rigueur de novembre dernier était majoritairement basé sur un matraquage fiscal supplémentaire (Impôt sur le revenu, TVA...) et assez peu sur une baisse des dépenses publiques. L'austérité sans baisse des dépenses de l'Etat, voilà ce que S&P n'apprécie pas. D'autre part, l'agence note aussi notre balance des paiements, qui comprend la rentrée d'investissements venus de l'étranger. A l'équilibre, il y a encore quelques années, elle compensait le déficit commercial. Ce n'est désormais plus le cas. La balance des paiements elle aussi se creuse, marquant, là encore, la faiblesse de l'économie française.

Dans les années 1980-1990, des pays européens comme le Danemark, la Suède ou la Finlande avait perdu leur triple A. Et l'ont depuis récupéré. Au point d'être maintenant parmi les pays les plus solides de l'union européenne, voire de l'euro (Finlande). Pourtant, le tableau de ces pays était à l'époque peu reluisant : déficit budgétaire important, dépenses et dettes publiques trop élevées, croissance quasi nulle. Comment ces pays scandinaves, modèles de la social-démocratie ont-ils remonté la pente ? Réponse : par des mesures drastiques et pas forcément social-démocrate. Ils ont d'abord diminué leurs dépenses publiques, en réduisant leurs nombres de fonctionnaires, et en menant des politiques de privatisations. Ils ont donc pratiqué l'austérité budgétaire pour rétablir les comptes. C'est là premier volet de la solution. Ils ont, en parallèle, mené des reformes structurelles, notamment de flexi-sécurité, pour dynamiser leur marché du travail et améliorer la compétitivité. Le chômage a ainsi baissé et les exportations repris. La balance commerciale est alors redevenue excédentaire.  C'est le deuxième volet de la solution. En une dizaine d'année, la situation économique s'est renversée et ses pays ont récupéré leur AAA et surtout leur dynamisme économique, parvenant à maintenir le chômage à un faible niveau.

Une politique de relative austérité budgétaire, couplée d'une amélioration de la compétitivité semblent être la voie à suivre pour sortir de cette piteuse situation. C'est celle que suit l'Allemagne depuis quelques années déjà. Elle s'en porte plutôt mieux qu'une France qui s'interroge encore...

vendredi 13 janvier 2012

Kodak, Blackberry... la chute des pionniers

C'est l'histoire de la chute de pionniers de l'industrie dans leurs secteurs respectifs, que ce soit la photographie ou la téléphonie mobile. En effet, deux groupes nord-américains sont actuellement en proie à de sérieuses difficultés sur leur marché. Avec leur avenir en question.

Ainsi, le géant américain de la photographie, Kodak, traverse une crise sans précédent dans son histoire. Largement distancé par ces concurrents asiatiques (Nikon, Sony, Canon Fujifilm...), en crise de liquidité face à des pertes qui s'accumule depuis 2005, Eastman Kodak envisage de se mettre en faillite, ce qui correspond aux Etats-Unis à se mettre sous la protection du chapitre 11. Se placer sous la protection de la loi ne signifierait pas nécessairement la disparition de la firme de Rochester. D'autres firmes y ont eu recours auparavant : la compagnie aérienne United Airlines, le groupe de télécoms Wordcom, le courtier Enron ou encore l'équipementier automobile Delphi. Mais ce serait néanmoins un coup très rude porté à l'entreprise. Seule alternative, la vente du précieux portefeuille de brevets et d'invention de l'entreprise qui pourrait trouver des acquéreurs. Mais, ceux-ci ont plutôt intérêt à temporiser pour attendre que les prix baissent. Le temps joue contre Kodak. Le groupe espérerait en tirer 500 millions de dollars. Mais doit absolument trouver 1 milliard de dollars pour espérer financer le fonctionnement de l'entreprise pendant son hypothétique protection sous le chapitre 11. Cette situation financière catastrophique impacte bien évidemment le cours de l'action de la firme. A la fin des années 1990, l'action était valorisé à 90 dollars. L'année dernière, elle atteignait encore les 5 dollars. Elle a désormais chuté à moins de 50 cents, et est menacé de suspension de cotation par la bourse de New York.

C'est néanmoins un énorme gâchis pour la firme basé à Rochester. Fondée en 1884 par Georges Eastman,  elle est l'une des pionnières de la photographie et marquera profondément le XXème siècle par ses nombreux brevets. C'est en effet à Eastman Kodak que l'on doit l'invention du fameux négatif, qui démocratisera l'appareil photo. On lui doit également au cours du siècle la pellicule argentique Kodachrome, ou encore l'appareil photo Instamatic, best seller des années 1960. Kodak devient alors le géant incontesté de l'argentique. Pourtant, c'est dans ses propres laboratoires  de recherche que l’entreprise creuse sa tombe. En 1975, elle est la première à mettre au point la photo numérique et dépose même le premier brevet avec le capteur CCD. Pourtant, la direction de l'entreprise ne croit pas au numérique et préfère se concentrer sur l'argentique qui lui réussit si bien. Grave erreur. Le groupe ne s'en remettra pas. 

La suite n'est qu'un lent déclin qui voit la montée en puissance de ses concurrents asiatiques (Nikon, Sony...). Ces derniers, au contraire, vont à partir des années 1990 se concentrer sur la photographie numérique que Kodak avait dédaigné. Avec la démocratisation du numérique des années 2000, c'est le pari gagnant. Kodak a perdu et ne réagit que trop tardivement en lancement ses propres produits. Le marché lui a déjà échappé. Eastman Kodak tente de reprendre la main avec le lancement de logiciels de traitement de photos ou la mise en place de bornes de développement de photos numériques. Mais le groupe est moribond et survit tout juste. L'ère Kodak est passé...

Un autre géant, canadien celui-là, est également en situation délicate. Certes, il n'est pas dans la situation catastrophique de Kodak, mais RIM (Research In Motion), fondé en 1984 par Mike Lazaridis, et célèbre pour sa gamme de téléphone intelligent (Smartphone) BlackBerry, va mal. Pionnier dans le lancement des Smartphones, notamment en Amérique du nord, BlackBerry a construit son image sur la capacité à échanger et lire des e-mails sur téléphone de façon totalement sécurisée. Et ce, dès le début des années 2000, alors que le téléphone portable commençait seulement à être disponible pour le grand public. Très vite, BlackBerry a séduit les entreprises et devient le mobile préféré des cadres. Réputé pour son infaillibilité, les plus grands de ce monde confiaient leur destin au petit appareil. Barack Obama est le plus célèbre "BlackBerry addict". Celui de Dominique Strauss Kahn resta célèbre pour avoir été oublié dans une certaine chambre d'un Sofitel à New York... Chez les ados, le Smartphone de la firme de Waterloo (Ontario) faisait également une percée significative...

Et puis voilà, RIM s'est peut être un peu reposé sur son leadership acquis sur le marché des Smartphones.   Elle n'a pas vu le vent tourner. A partir de 2007, le marché du Smartphone se démocratise. Lancé en grande pompe par la firme à la pomme, l'iphone va significativement changer la donne. Le petit bijou de Steve Jobs rencontre un succès foudroyant aux quatre coins de la planète. S’enchaînent les sorties, toujours très attendues, des versions suivantes : iphone 2, iphone 3, iphone 4, iphone 4S, bientôt iphone 5... Apple met surtout sur la table de nouveaux enjeux sur le marché des Smartphones : le design et l'ergonomie deviennent ainsi prépondérant, les fonctionnalités (téléphone, messagerie, mail...) allant de soi. Le tactile devient un passage obligé. Enfin, la possibilité de télécharger des applications via itunes pour gérer ses activités quotidiennes (lecture, jeu, utilitaire...) devient là encore un modèle de consommation nouveau et de plus en plus incontournable. Les constructeurs asiatiques (Samsung, HTC, LG...) emboîtent le pas et fabriquent des Smartphones plus soignés et ergonomiques. Ils s'associent alors à Google pour utiliser l'OS Android de la firme de Mountain View. Google va également mettre au point un Android market pour télécharger des applications, sur le même modèle que l'itunes d'Apple. Et c'est le pari gagnant.

Pendant ce temps là, BlackBerry est plus conservateur, et ne fait aucun effort spécifique pour revoir le design de ses appareils et la facilité d'utilisation. La technologie tactile reste l'exception sur les BlackBerry, alors qu'il devient la norme chez les concurrents. L'OS n'est pas le plus performant et n'a que peu évolué par rapport à l'OS Android, particulièrement réactif et de philosophie open source. La firme de Waterloo se met aussi aux applications, mais timidement, et son catalogue est extrêmement modeste par rapport à celui d'Apple ou d'Android. Et c'est l’hémorragie. Les nouveaux consommateurs et les jeunes veulent un iphone ou un Samsung. Même les cadres, coeur de cible de la firme depuis toujours, désertent pour des iphones eux aussi. Question image, les entreprises préfèrent s'associer à la dynamique firme à la pomme. 

Dans la foulée, 2011 est une annus horribilis pour BlackBerry. Les ventes baissent, alors même que le marché mondial à conquérir ne cesse de croître. A l'automne 2011, la firme connait une panne de serveur spendant trois jours. Les mails ne passent plus. L'image de marque de BlackBerry en prend un coup. Le PDG doit s'excuser et c'est le modèle, spécifique à RIM, de serveur sécurisé qui est en question. Dans la foulée, La firme annonce un an de retard sur le développement de son prochain OS. Et la commercialisation de la tablette tactile Playbook est également un échec. Elle est finalement bradée. 

BlackBerry, contrairement à Kodak, a encore de la liquidité et son avenir n'est pas aussi sombre. Mais elle a malgré tout annoncé le licenciement de 2000 personnes. Mais ce qui la rapproche de Kodak, c'est qu'elle a perdu la main dans un secteur qu'elle avait pourtant sous son contrôle il y a peu. Elle est désormais condamnée à suivre et survivre, avec l'illusion de rattraper son retard ou de guetter la faute de ses concurrents. Mais n'est ce pas déjà trop tard ? L'innovation n'attend pas. Etre un leader confortablement installé ne suffit pas et la démocratisation des produits sur le marché est un défi sans cesse à renouveler. C'est la dynamique du capitalisme telle que la décrivait l'économiste autrichien Joseph Schumpeter. 

lundi 9 janvier 2012

François Hollande ne suscite pas le "désir"

Un sondage, réalisé par l'Ifop, en ce début de mois de janvier le traduit : François Hollande recule encore. Il est toujours positionné en tête au premier tour, mais avec désormais à 28% d'intention de vote, en baisse de 2 points. Son principal adversaire, Nicolas Sarkozy, le talonne désormais à 26%. Au second tour, l'écart est encore net, mais, là encore, se resserre : c'est désormais du 54/46, contre encore 56/44 voir même 58/42 il y a seulement quelques jours. 

Ce n'est, bien entendu, qu'un sondage, et l'expérience a montré, par le passé, qu'ils se sont largement trompés. Néanmoins, pour le socialiste, même si un ajustement "mécanique" était à prévoir, la chute est vertigineuse. On était à 63/37 au lendemain de la primaire d'octobre, à 60/40 en novembre, et 58/42 en décembre. La trêve des confiseurs et les discussions pendant les repas de famille des fêtes de noël n'ont pas engendré d'engouement envers le candidat socialiste, devant pourtant susciter et l'espoir de changement pour les électeurs de gauche et les déçus de Sarkozy.

A la vérité, si ces tendances se confirment, les courbes pourrait commencer à s'inverser en février/mars si le candidat Hollande ne réagit pas davantage. On sait que cette période est souvent décisive sur la cristallisation des votes et donne généralement le résultat final. Pour avoir mal négligé cette période, nombre de favoris, ont fini au cimetière des candidats vaincus à l'élection présidentielle. On pense notamment à Edouard Balladur en 1995, tétanisé par son avance confortable et qui fut incapable de prendre le moindre risque. Ou encore Lionel Jospin en 2002, qui en quelques semaines, ternit son image par une remarque maladroite sur un Chirac "vieux, usé et fatigué", et avouant sa naïveté sur les questions de l'insécurité. Dans les deux cas ça n'a pas pardonné. La surprise au soir du premier tour fut amer.

François Hollande doit prendre garde et méditer ces exemples, s'il ne veut pas connaitre le même sort. D'abord il se balladurise. Grandissisme favori d'après les sondages et de l'avis de l'ensemble des observateurs politique, personne ne le voit perdre. Du coup le candidat du parti socialiste préfère prendre le moins de risque possible pour ne pas attiser le feu nourrit de ses adversaires. Cela l'évite aussi de trancher sur tous les sujets qui l'on parfois mit en difficulté pendant les primaires : le nucléaire, les retraites, les 60 000 embauches de fonctionnaires... Sujet qui ne sont pas tranchés pour le moment et ne le seront peut être pas... L'annonce de son programme fin janvier a finalement été désacralisée. Le candidat fera ses annonces au fur et à mesure de la campagne. Son directeur de la communication, Manuel Valls, soutient qu'il n'y a pas urgence. Tout de même, pour un parti d'opposition, ne pas avoir plus d'idées que cela après 10 ans d'opposition et à 3 mois de l'échéance du premier tour, cela ne rassure pas. D'autant qu'en face, le président Sarkozy a, lors de la cérémonie des voeux, fait un certain nombre de propositions dont notamment les fameuses TVA sociale et taxe Tobin. Même si celles-ci sont peu réalistes, surtout dans un contexte franco-français, le futur candidat de l'UMP prend des risques et lance des débats et des initiatives. Et ce, alors qu'il n'ait pas encore candidat déclaré. C'est tout de même paradoxale, mais ce n'est pas un très bon signe pour le député de Corrèze qui n'a pas encore réussi à imposer d'idées majeures dans le débat public.

Ensuite François Hollande se jospinise. Victime de se qu'on appelle un "off", il parle du président comme d''un "sale mec". Bien sûr, ceci ne mérite pas toute cette polémique, la discussion étant privée et la phrase sortie de son contexte. Mais un politique aussi expérimenté qu'Hollande ne devrait pas se faire avoir aussi facilement. Il a donné une occasion en or aux partisans du président de rendre la monnaie du "Cass' toi pauvr' con". Et ceci, le lendemain de sa lettre publiée dans Libération, gâchant du coup son effet. Cette Lettre dans libération d'ailleurs n'est qu'une critique acerbe du pouvoir en place et surtout du président Sarkozy. Il table certainement sur le rejet de l'opinion du président actuel et l'usure de la droite au pouvoir. Et là encore, le député de Corrèze n'a pas jugé utile de lancer la bataille 2012 sur le plan des idées pour occuper le terrain. Au vu des sondages, il faut croire que les électeurs attentent plus de concret.

Une campagne morne, quelques dérapages malvenus, peu d'idée, François Hollande fait pour l'instant une campagne à minima, sans doute sûr de sa victoire. Mais peut être en réalité est-il déjà sur la pente de la défaite. Les grands vainqueurs à la présidentielle, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, le diront : pour gagner il faut susciter le "désir", et pour cela prendre des risques. Ce que n'ont pas réussi à faire les Balladur et Jospin, pas plus que le candidat Hollande pour le moment. Plus inquiétant pour ce dernier, Ségolène Royal, en 2007, malgré une campagne baroque avait suscité nettement plus d'engouement à la même époque.

Quoiqu'il en soit, il devient évident que l'élection de 2012, ne suscitera pas d'engouement, à gauche comme à droite. Elle se jouera sur un vote par défaut entre les dubitatifs du "mou" Hollande et les déçus de "l'agité" Sarkozy. 

jeudi 5 janvier 2012

Les usines à gaz de la TVA

C'est l'histoire d'une usine à gaz à la française comme le pays peut si bien exceller à en créer. C'est l'histoire d'un imbroglio administratif Kafkaïen, mêler à un arbitrage absurde, digne certainement d'Ubu roi (L'avantage au moins, c'est qu'on revoit les grands classiques de la littérature). Je veux parler bien sûr de la TVA à la française. Petite (tentative) d'explication.

Alors il y a tout d'abord le taux "normal" de TVA, c'est à dire à 19,6%. Sont concernées globalement de toutes les opérations de ventes de biens et de services, à l'exception de toutes celles soumises à un autre taux. Donc taux qui n'est plus si "normal" que cela, voir même "anormal", selon le point de vue considèré. Sont quand même concernés, entre autre, les achats de vêtements, certains biens de consommations courantes, l'électroménager, la consommation d'énergie, l'essence, ventes de CD et DVD, la séance chez le coiffeur...

Oui mais voilà, il y a aussi un taux "réduit" à 5,5%. Il vise pêle-mêle les biens de premières nécessités, certains biens de consommation courantes ou encore des secteurs spécifiques à aider. Examinons un peu tout cela de plus près. C'est digne d'un inventaire à la Prévert (je vous avais prévenu, on révise ses classiques aujourd'hui). Sont ainsi concernés les biens de premières nécessités, tel que l'eau, et un certain nombre de produits alimentaires (Conserves, pâtes, céréales, huiles, fruits, plats cuisinés, sucre, confiserie, chocolat, lait, boissons, non alcoolisées...). Mais attention, il y a des exceptions ! Pour les bonbons, cela dépend du taux de sucre qu'il y a. Et certains produits de luxe d'alimentation n'en bénéfice pas non plus. Quant aux boissons non alcoolisés, attention au sucre, il y a une taxe supplémentaire sur les soda (Coca) qui rentre en vigueur. Sauf que s'il n'y pas de sucre, mais de l'édulcorant à la place (Coca light), il y a aussi taxe. Et quand il n'y a pratiquement rien du tout (Coca Zero), eh bien c'est toujours taxé ! La culture est plutôt bien lotie. Pour les livres, c'est 5,5%. Pour les sorties théâtres, cinémas, concerts aussi. Par contre, pour les rencontres sportives, ça ne marche pas. Les législateurs vantent les bienfaits du sport, mais il faut croire que les lobbyistes sportifs ne se débrouillent pas aussi bien que leurs homologues du spectacle. Toujours niveau culture, les oeuvres d'arts sont taxés à seulement 5,5%, mais à une condition tout de même, que l'artiste soit vivant. Eh oui, il faut acheter son Van Gogh plein pot. Autre curiosité, si la consommation de gaz et d'électricité est taxé à 19,6%, l'abonnement lui est à 5,5%. Si vous saisissez la subtilité, n'hésitez pas à m'écrire. Enfin, bonne nouvelle, acheter des fleurs est également à taux réduit. Alors messieurs, faisons un petit effort pour nos chéries, c'est subventionné.

J'ai découvert il y a peu qu'il y aussi un taux "super-réduit" à 2,1%. Pas de miracle, il y a relativement peu de produits concernés. On signalera bien évidemment les médicaments remboursés par la sécurité sociale. Mais il y a là encore quelques curiosités qui valent le détour. Ainsi ce taux "super-réduit" concerne aussi la presse. A condition toutefois de ne pas être à caractère pornographique. Ah ben oui quand même ! Egalement à ranger dans cette catégorie, les 140 premières représentations théâtrales d'une oeuvre nouvellement créée. Il fallait y penser.

Et puis il y a les exceptions à tout ce que je viens de citer précédemment. Fonction cette fois de critères géographiques. Prenons la Corse par exemple. L'essence est à 13% au lieu de 19,6%. Les biens au taux réduit de 5,5% en France continentale passe au taux super-réduit de 2,1% sur l’Île de beauté. Enfin, le théâtre est au taux, appelons le "ultra-réduit", de 0,9%... Dans les Départements d'Outre Mer (Guadeloupe, Martinique, Réunion), c'est encore autre chose. Ce qui est à 19,6% en métropole passe à 8,5% dans ces DOM. Et ce qui est à 5,5% passe à 2,1%. Comme en Corse. Ouf, on s'y retrouve. Quant à la Guyane, c'est tout simple. Pas de TVA.

Et puis, il y a les nouveautés. Pendant longtemps, la restauration à emporter et les fast foods jouissaient d'une TVA réduite (5,5%) pendant que la restauration classique était à 19,6%. Depuis Juillet 2009, et le feu vert de Bruxelles après intense lobbying de la France, tous les restaurants sont à 5,5%. Avec un succès plutôt mesuré en terme d'embauche, d'augmentation de salaires, et de baisse des prix à la carte. On ne manipule pas si facilement la TVA. 

Tout récemment, dans le cadre du plan de rigueur annoncé en octobre par le gouvernement Fillon, la TVA est passée de 5,5% à 7%. Oui mais c'était trop simple comme ça. Il y a bien sûr des exceptions et des distinctions subtiles à faire. Notamment concernant les produits alimentaires. Et la farce continue. Suivez un peu, ce n'est pas facile. Alors à première vue, la règle parait pourtant simple. Quand le produit est à emporter, c'est 7%. Quand il est à consommer plus tard, c'est 5,5%. Et comment fait-on la différence? Très simple voyons. Le critère, c'est le contenant. Quand votre boisson favorite est vendu dans un verre en plastique c'est 7% car à emporter et consommer tout de suite. Quand elle est vendue en cannette ou bouteille, par contre, c'est 5,5%, car consommable plus tard. Il est vrai qu'il est extrêmement rare de boire une canette le midi avec son sandwich mangé sur le pouce. Par contre chez soi, la cannette, c'est le format idéal... Plus subtile encore, pour la vente de nourriture à emporter, il y a deux critères : la présence de couverts et l'assaisonnement. Si le produit est vendu avec des couverts, c'est 7%, sinon c'est 5,5%. Vous êtes prévenu maintenant, pour payer moins cher, le prochain sandwich sera sans mayonnaise et le prochain Kebab sans harissa. Et pour la salade, il ne faudra pas avoir peur d'y mettre les doigts. Sauf que, sauf que... il y a quand même une petite exception (Désolé). Le yaourt, même avec cuillère, reste à 5,5%. Ben oui, chez soi ou sur un banc, la cuillère, ça aide toujours pour manger le yaourt. Sinon, suggérons de le boire à la paille. Enfin, ultime critère : la congélation. Et le raisonnement est implacable. Suivez bien. Un produit surgelé, c'est 5,5%, alors qu'un produit similaire au rayon frais (entre 0 et +4°C donc si tout va bien dans votre supermarché favori) c'est 7%. Mais attention là encore, il semblerait, selon les législateurs, que si dans les parages traîne un micro-onde ou un four avec option décongélation, ça change encore la donne. Retour à 7% !?... Qu'en est-il en Corse ou dans les DOM? Là j'avoue, je ne sais pas... J'ai l'impression d'être emporté dans le tourbillon de la valse à mille temps chanté si magnifiquement par Jacques Brel.

Et vous ne savez pas la dernière ? On parle maintenant de mettre en place une TVA dite "sociale" ou "anti-délocalisation", c'est selon. Encore un casse tête en perspective. Je reviendrai sur ce sujet dans un prochain post, point trop n'en faut d'un coup...

mardi 3 janvier 2012

Weibo : Vers une révolution au pays de la pivoine ?

Le 23 Juillet 2011, le train à grande vitesse reliant Shanghai et Pékin déraille à la gare de Wenhzou. Le bilan est dramatique : 40 morts et des centaines de blessés. Gêné, le gouvernement de Pékin tente de dissimuler l'accident auprès de l'opinion, ou du moins de le minimiser. Au pays de la pivoine, le régime communiste contrôle la diffusion des contenus sur internet et censure ainsi strictement toute référence au déraillement. Las, dans les heures qui suivent, l'information se propage à très grande vitesse auprès de centaines de millions de chinois. Qui a brisé la censure ? Le coupable s'appelle Weibo. 

Qui est ce dangereux briseur de censure ? Weibo est tout simplement un site de micro-blogging disponible sur les smartphones de millions de Chinois. Il permet l'échange de contenus de type texte ou image. Les textes étant limité à 140 caractères. C'est en cela le cousin local de Twitter, interdit en Chine, au même titre que Facebook. Or Weibo, disponible sur Smartphone et s'appuyant sur la technologie de la diffusion de message instantanée, ne peut pas être censuré, à moins de couper tous les téléphones des chinois. 

Ainsi, Weibo l’incontrôlable est utilisé quotidiennement par 300 millions de Chinois qui font de plus en plus confiance à ce média pour s'informer, plutôt qu'aux médias contrôlés par le pouvoir. Il faut dire que Weibo permet de diffuser les informations qui dérangent les dirigeants chinois : le déraillement du train à Wenhzou pour cause de matériels défectueux, l'effondrement de mines, la pollution des grandes villes du pays, la répression violente des manifestations et des opposants...

On se souvient qu'il y a un an, le monde Arabe s'enflammait, notamment au Mahgreb. Débouchant sur les révolutions dites du "Jasmin" en Tunisie, en Egypte ou plus difficilement en Libye. Le pouvoir a tremblé au Maroc. Il tremble encore en Syrie. On avait décrit ces révolutions comme les premières révolutions "Facebook". Le grand site communautaire de Mark Zuckerberg avait en effet permit de fédérer à la vitesse de l'éclair des opposants au départ isolés. Et permit la diffusion instantanée de points de rassemblement pour les manifestants. Ou encore, très important, la possibilité de poster photos et vidéos de la répression qu'ils ont subi. Ces images ont fait le tour du monde, et nombre de citoyens de tous les pays se sont rangés ainsi à leur cause, mettant la pression sur leurs propres pouvoirs publics pour intervenir.

Facebook étant interdit au pays de la pivoine, est ce que les chinois détiennent avec Weibo l'outil d'une future révolution ? Une réflexion tout d'abord. Nous avons vu, avec les évènements dans le monde arabe, que les méthodes à l'ancienne des dictatures (Censures, intimidations ou emprisonnements des opposants...) fonctionnaient de moins en moins. Tout simplement parce que la technologie bouleverse singulièrement la donne. Les opposants ne sont plus d'illustres dissidents que l'on peut contrôler ou emprisonner comme Soljenitsyne ou Sakharov du temps de l'URSS. Ce sont désormais des milliers voir millions d'anonymes, pianotant sur un clavier d'ordinateur ou de smartphone et diffusant des messages en instantanée, donc non censurable, et difficile à tracer.

De mon point de vue, il me semble que trois conditions sont nécessaires pour envisager un soulèvement actuellement dans le monde. Que ce soit en Chine, en Russie ou d'autres pays Arabes. Nous avons pu l'observer lors du "printemps Arabe". Tout d'abord, il faut une lassitude croissante, se transformant en colère, d'une partie de la population, souvent les jeunes, vis à vis d'un pouvoir autocratique et répressif.  Il faut ensuite une dégradation de la situation économique. Enfin, il faut la technologie et le média pour pouvoir fédérer les opposants et agir.

Prenons le cas du printemps Arabe. Nous avons eu la conjonction de ces conditions : Des Ben Ali et Moubarak depuis trop longtemps au pouvoir de régimes autoritaires et répressifs, une dégradation des conditions de vie avec la crise économique actuelle, ne donnant aucun espoir à de jeunes diplômés condamnés au chômage. Et enfin, comme je l'expliquais précédemment, des médias comme Facebook ou Twitter capable de fédérer les opposants.

Revenons au cas de la Chine. Oui, il commence, timidement, à y avoir une colère de certains chinois vis à vis du pouvoir en place. Le pays s'ouvre sur le monde, les chinois voyagent, se déplacent et rêvent pour les plus jeunes d'une plus grande liberté d'expression et d'information. Le sort des dissidents et opposants politiques est désormais connu de tous. S'agissant de la situation économique, elle est solide pour l'instant mais commence à s'effriter. L'inflation est tout de même de 20%, l'immobilier baisse et mange l'épargne que les chinois mettent de côté pour leur futur retraite. La croissance ralentit (mais est encore à 8% tout de même), créant une pression pour intégrer l'importante main d'oeuvre venue de la campagne et se ruant vers les villes à la recherche d'une vie meilleure. Et enfin, le non censuré et très libre Weibo devient le premier média d'information en Chine. Des manifestations, durement réprimées, commencent d'ailleurs à être connues et rapportées. La situation économique continuant pour l'instant de s'améliorer, le pouvoir peut être tranquille. Mais le jour où ça ne sera plus le cas, on peut imaginer que la situation explosera, et on peine à imaginer les conséquences de cette révolution de la pivoine...

Attention toutefois, comme le montre l'exemple Tunisien et Egyptien, les révolutionnaires du web 2.0, sans organisation ni leader, peuvent faire trembler, voir chuter le pouvoir en place. Pas en reconstruire un. Les opposants institutionnels (Ennhada en Tunisie, Les Frères Musulmans en Egypte) reprennent le contrôle. Nous verrons si c'est pour le meilleur ou pour le pire...