vendredi 3 février 2012

Et revoilà la TVA sociale

La TVA sociale, c'est un de ces vieux serpents de mer dont on entend parler depuis 20 ans. Introduit avec succès au Danemark et plus modestement en Allemagne, elle est censée résoudre tous nos problèmes de compétitivité tout en faisant financer la protection sociale par nos importations. Sur le papier, ça semble formidable. Avec une grosse interrogation cependant sur le pouvoir d'achat des ménages. Du coup les adversaires ne manquent pas : TVA patronale dit Marine Le Pen, c'est une TVA anti-social pour Jean-Luc Mélenchon. Ses partisans préfèrent parler de TVA emploi ou TVA anti-délocalisation. Chacun baptise donc cette TVA comme il l'entend, selon son adhésion ou non au principe.

Mais sur quel principe repose-t-elle ? Eh bien c'est assez simple. En échange d'une baisse des cotisations sociales qui pèsent sur le travail, la TVA est augmentée de plusieurs points. Double effet attendu : D'une  part, le salarié devient moins coûteux pour l'entreprise qui améliore sa compétitivité. D'autre part, les importations se renchérissent alors que les exportations bénéficient d'un gain de compétitivité. C'est globalement l'effet d'une dévaluation, chose que l'euro nous interdit désormais de faire. Mais attention, certains, tel le président de la république, martèlent une idée fausse et très en vogue au sujet de cette TVA : avec son instauration, ce sont les produits importés qui vont désormais financer la protection sociale en France. C'est évidemment faux. Comme le rappelle l'ancien ministre de l'économie, Alain Madelin : "A-t-on déjà vu une vache payer une taxe sur les vaches ?". Cette formule humoristique illustre à l'évidence que celui qui paye la TVA sur les produits fabriqués en Chine, ce n'est pas le produit, ni même la Chine, mais bien le consommateur français.

Et c'est là qu'est la source du débat. Ne va t-on pas alimenter l'inflation dans cette histoire ? Non répondent ses partisans. L'ancien président de la commission des finances au Sénat, le centriste Jean Arthuis, le démontre : en exonérant partiellement les cotisations sociales, on baisse le coût de revient du produit. Le prix de vente hors taxe peut alors baisser en conséquence. Et, à ce prix hors taxe, on y ajoute le surplus de TVA. Finalement, le prix TTC reste stable, voire diminue légèrement. Il n'y aurait donc eu qu'un simple transfert des cotisations vers la TVA. Et c'est là que les sceptiques de la mesure se réveillent. Car l'instauration de cette mesure suppose qu'automatiquement les entreprises vont répercuter les exonérations partielles de cotisations sociales sur le prix des produits hors taxes. Et ça, rien ne le garantie. Il est possible de voir apparaître un effet d'aubaine pour les entreprises qui pourront, pour certaines, accroître leurs marges sur le dos des consommateurs, ou simplement sortir la tête de l'eau pour les plus fragiles, ce qui serait en revanche une bonne chose. Il y a fort à parier que les comportements varieront d'un secteur à l'autre selon l'importance de la concurrence. Une chose en revanche est certaine. Les produits étrangers qui seront importés verront bel et bien leurs prix augmenter avec le taux de TVA, leurs cotisations sociales restant inchangées. A moins que des pays voisins mettent à leur tour en oeuvre cette mesure pour contrebalancer. Il y a un vrai risque. On se retrouverait alors dans le même schéma que par le passé, avec une course des pays industriels aux dévaluations compétitives pour exporter. 

Néanmoins, si l'on peut raisonnablement penser qu'une inflation peut poindre par l'application de cette mesure, il y a fort à parier qu'elle sera faible, celle-ci étant instaurer dans une période économique difficile, avec une faible croissance et une faible inflation. L'exemple de son instauration en Allemagne, depuis 2007, semble aller dans ce sens. On avait estimer à l'époque une accélération des prix de 0,6% à imputer à cette mesure. Il convient également de modérer les attentes et les risques de cette décision. L'augmentation de la TVA n'est que de 1,6% quand d'autres préconisaient plusieurs points, voire comme au Danemark à 25%. Finalement, avec cette augmentation, la TVA "normal" passe à 21,2% et se situe ainsi dans la moyenne de la zone euro (environ 21%). Et en contrepartie, les cotisations sociales, plus élevées en France qu'ailleurs, vont baisser. On est  finalement en pleine convergence européenne . Il faut aussi dénoncer les critiques infondées. Les produits de premières nécessité, aux taux réduits de 5,5% et 7%, restent inchangés. Quand aux produits importés, ce sont souvent des produits chers (Téléviseur écran plat, Smartphone...). Quand on peut mettre 700 euros dans un téléviseur, on peut surement payer 10 euros de plus de TVA. 

Loin d'être une idée géniale, cette décision tardive de Sarkozy ne mérite cependant pas toute cette agitation économico-médiatique et va plutôt dans le bon sens. Dans le sens d'une plus grande compétitivité des entreprises françaises qui en ont bien besoin dans le climat économique actuel, et surtout futur. Il était temps d'ouvrir le débat...

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